Journal d’une pèlerine : L’appel

Combien de personnes, comme moi, ont toujours imaginé qu’effectuer le pèlerinage était chose lointaine et peut-être irréalisable ?
Nous connaissons tous par cœur cette formule : « Les piliers de l’islam sont au nombre de cinq dont le pèlerinage quand la capacité le permet… »
J’ai toujours pensé que de toute façon, faire son pèlerinage était une épreuve que Dieu excusera si je ne l’accomplissais pas car je n’ai pas la capacité de le faire.
Je faisais partie de ceux à qui quand on disait : « Que Dieu t’offre le pèlerinage », je répondais : « Amine » sans vraiment le ressentir ou même l’imaginer.
Un jour, par le don d’un frère, je vis les rites du pèlerinage d’un groupe : le voyage, puis la Talbiyya, la Omra, les rites, puis les adorations et la visite de notre bien-aimé Mohammad (paix et salut sur lui). J’entendis alors la phrase qui m’avait changé ma vision du pèlerinage : « …Même si nous étions dans l’incapacité d’aller en pèlerinage, il était primordial d’en faire au minimum l’intention sincère pour que, si Dieu nous rappelait à Lui avant de l’avoir effectué, nous en aurions la rétribution… ».

Comment ne jamais avoir pensé à le faire ? Bien-sûr, l’envie était présente, le cœur malade de voir les lieux saints et d’aller vers Dieu mais c’était un rêve, un souhait loin d’être réalisable. Je reçus un soufflet. Quelle insouciance m’enveloppait et combien étais-je négligente !

Mais Dieu accepte les repentants et les sincères. Ce film marqua un point de rupture dans ma vie et je fus ferme dans mon intention : Si Dieu m’appelle, j’irai répondre sans hésitation.
Commença alors mon errance entre questionnements, espoir, peur, entre joie et attente. Mais, mon intention était bien là, ferme et pure depuis 2008.

Je Te cherche durant mes journées, dans mes invocations, dans mes prières, dans mes erreurs, je cherche Ta clémence et Ton pardon… Es-Tu là ? Tout près de moi et de tous ceux qui T’appellent ou qui demandent Ton assistance. Je ne suis rien face à Toi… Pour qui je me prends en délaissant Tes impératifs ? Pardonne-moi cette errance loin de Toi et permets-moi par Ta bonté de venir et de Te prouver que je T’aime.
C’était dit : le pèlerinage est l’adoration de l’Amour suprême, l’amour sans lequel je ne suis qu’un oubli sur Terre.
Les jours et les années se sont succédés et l’intention était intacte d’année en année et se renforçait de plus en plus mettant le cœur à rude épreuve et entraînant des interrogations : « Dieu, veux-Tu vraiment de moi, mériterai-je de goûter à Ton adoration et de goûter à Arafa où Ta fierté de Tes serviteurs sincères et humbles retentit autour de Ton Trône et parmi les Anges témoins de cette meilleure journée de l’année ? »
Mes péchés me pèsent et mes larmes me brûlent de désir. Appelle-moi ! Accueille-moi dans l’océan de Ta miséricorde, regarde-moi avec l’œil de l’approbation et de la satisfaction. Mes mains ne se lèvent que difficilement, la vie d’ici-bas les alourdit, revigore-les par l’apaisement de mes erreurs et leur expiation.
Appelle-moi !

Quand en 2017, un songe a attisé la brûlure de mon cœur. Une course effrénée me fit atterrir dans un endroit apaisé et calme, d’une autre dimension, d’un autre univers. La honte m’envahit. Comment arriver essoufflée et apeurée alors que des gens autour étaient en compagnie de Dieu, souriants et comblés. Deux unités de prière apaisèrent ma peur et mirent fin à ma course et à celui qui me pourchassait. Que d’incantations, d’invocation et d’évocations m’emportèrent en présence de ce père que Dieu lui fasse miséricorde. Finissant les deux unités de prière, une voix retentissait : « La prochaine étape sera le Haram… La prochaine étape sera le Haram… »
Mais je ne fus pas appelée cette année-là non plus. Où étais-je de Dieu et de Ses recommandations ? Suis-je digne de Son appel vers Lui, de Sa demeure ? Suis-je à la hauteur de me retrouver sur les pas des Prophètes : ceux d’Adam qui colla sa joue et sa poitrine sur le pan de la Kaaba, le pan du Salut et de la réponse de Dieu, qui écouta ses invocations et son repentir, sur ceux de tous les prophètes qui sont passés par là, sur ceux de Mohammad, notre bien-aimé, et d’autres pieux ? Suis-je à la hauteur de sentir cette lumière qui emplit les coins de cet endroit, de Ton eau que Tu fis jaillir pour Hajar et Ismaël ? Suis-je capable de vivre ce que Tu veux m’apprendre sur Toi, sur moi-même et sur ma destinée ?
Appelle-moi !

L’année d’après, 2018, fut une épreuve comme jamais au moment du pèlerinage. Les gens autour de moi partaient vers les lieux saints et moi, toujours là, je ne bougeais pas. La déception fut immense. Je ne méritais pas… Ces personnes étaient plus sincères que moi, c’était une certitude. A leur retour, leurs visages parlaient de tout ce qu’ils vécurent et virent là-bas. Personne n’osait vraiment exprimer son ressenti comme si chacun avait peur que cette lumière ne se dilapide rapidement le laissant orphelin de Dieu. Il n’y avait rien à dire, il fallait le vivre. Mais quand le vivrai-je ? Et le vivrai-je un jour ?
Appelle-moi !

Mais comme l’endurance est la clé de la réussite, en 2019, la bonne nouvelle est arrivée et je ferai peut-être (je ne le croirai que lorsque je serai face à la demeure de Dieu) partie du voyage cette fois-ci et ce ne sera pas la dernière fois si Dieu veut bien m’accueillir…

2 commentaires

  1. Merci chère Takwa pour cet article qui a fait couler mes larmes. J’ai hâte de lire la suite.

    C’est émouvant de lire certaines phrases de cet article qui font écho à ce que je ressens…

  2. Un grand merci pour ce magnifique témoignage touchant et à la fois bouleversant, c est tellement fort et tellement vrai ce que tu décris si bien qu’Allah t’enveloppe de Sa Grande Miséricorde ma chère Taqwa!

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