Changement climatique : pourquoi les évidences ne suffisent-elles pas ?

C’était il y a un peu plus d’un an. Le 13 novembre 2017, pas moins de 15.000 scientifiques donnaient l’alerte : l’environnement va très mal.  Émissions de CO2, surpêche, pollution des eaux, boom démographique … les signaux sont au rouge. Ce qu’on appelle “le changement climatique” est désormais irréversible et inarrêtable. Traités et signatures n’y changeront plus rien. Sommes-nous devenus aveugles ?

Un changement est possible : il est fait d’actions concrètes, individuelles et collectives, politiques et économiques. Un changement est même obligatoire si l’on fait rentrer dans l’équation nos générations futures. Cependant nous continuons à vivre dans une idéologie du progrès continu alors en totale contradiction avec les cycles naturels. La volonté de contrôle de la nature, l’hyper-individualité, voilà ce qu’il manquait au cocktail. Comment peut-on expliquer notre inactivité par rapport à ce phénomène ?

Serions-nous simplement égoïstes ?

Une étude menée par Tobias Brosch et ses collègues de l’Université de Genève (1) a mis en lumière la relation entre égoïsme et absence de réaction. Des personnes se qualifiant comme “égoïstes”, recrutées via un questionnaire, furent confrontées à des images de potentielles conséquences du réchauffement climatique. Les participants devaient réagir à ces images, en s’exprimant quant à la gravité de celles-ci et censées se produire à des échéances variables allant jusqu’à 2085, pendant que leur activité cérébrale était mesurée par IRMf. Résultat : les personnes autocentrées se sentent bien moins préoccupées que les autres par les événements qui se dérouleront après leur mort.

Ou simplement … individualistes ?

Dans le cas de l’étude de Brosch, les résultats s’expliqueraient par une faible activation du cortex préfrontal ventromédian, zone s’activant intensément quand nous imaginons le futur lointain, et ce d’autant plus que les événements simulés sont liés à nos objectifs personnels. Et s’il s’agissait, en majeure partie, de l’idéologie de l’individualisme tout puissant ? Selon Raphaël Glucksmann, essayiste et homme politique français, “On vit dans une société individualiste, une société du JE. Nous manquons d’un NOUS -ce que les mouvements d’extrême droite ont bien compris-. Or, en nous considérant uniquement comme des individualités indépendantes de l’environnement dans lequel on évolue, on se met le doigt dans l’œil… Quand on pense en JE, on ne pense pas à l’avenir de ses enfants, de la planète, de la forêt, des océans, des espèces en voie disparition “. Il dénonce également la société du zapping, dans laquelle nous évoluons et accordons la même priorité aux informations auxquelles nous sommes exposés : “Il en résulte qu’au lendemain de l’appel de la communauté scientifique, nous pensons déjà à autre chose…“.

Le NOUS pour inverser la tendance

La prise au sérieux du changement climatique va nous permettre de sauver deux choses: à la fois l’avenir de la planète et celui de nos démocraties. Et cette prise au sérieux passe par la notion du NOUS. Un intérêt important pour cette notion qui rallie les humains à leur environnement plutôt qu’à celle qui les sépare. Sans ce clivage, il est possible d’instaurer toute une série de mécanismes de responsabilité(s) : plus encore de sensibilisation à l’impact que peuvent avoir les actions individuelles et collectives, et l’occasion de sortir de l’individualisme prôné de nos jours dans la société. Allons vers un discours collectif, car l’écologie nous réinscrit en tant qu’individu dans le tout de notre environnement. Le NOUS existe car nous sommes tous les habitants de cette planète. Avec cette même notion du NOUS, nous avons dans les mains toutes les clés pour réorganiser la société, la politique et l’économie autour de cette question: “Est-ce que, oui ou non, nous allons réussir à sauvegarder notre habitat commun ? Et comment ?”

(1) https://www.unige.ch/communication/communiques/2018/cdp180425/

Source : https://www.rtbf.be/lapremiere/article/detail_changement-climatique-pourquoi-les-evidences-ne-suffisent-elles%20pas

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