La sincérité du cœur et la conformité à la Loi

Les savants de l’Islam évoquent, unanimement, deux règles d’or qui ne vont pas l’une sans l’autre et qui représentent les deux conditions requises pour qu’une œuvre quelconque d’un fidèle puisse compter en tant que bonne œuvre salvatrice et action juste agréée de Dieu: c’est ce que les doctes formulent par les deux termes arabes : Al-Ikhlâs et Al-sawâb, c’est-à-dire la sincérité du cœur et la conformité à la Loi.

Al-ikhlâs est une notion relative à l’intention qui renvoie à la présence nécessaire à Dieu et au dévouement complet du cœur pour Dieu en tout agissement. Cette notion fait écho à la dimension de la purification de l’âme (Tazkiya), de la vigilance du cœur et la lutte contre les insinuations de l’égo et de Satan.

Dieu dit dans le Coran : « Pourtant, que leur a-t-on ordonné, si ce n’est d’adorer Dieu, Lui vouant un culte exclusif … » [1]

Le Prophète, paix et salut de Dieu sur lui, a dit également : « Dieu -Exalté soit-Il- a dit : « De tous les associés, Je suis Celui qui se dispense le plus de toute forme d’associationnisme (chirk). Quiconque accomplit une action en M’y associant un autre que Moi, Je l’abandonne, (lui) et son associationnisme. » [2]

Al- Fudayl bnu ‘Iyâd, un grand parmi les grands ancêtres de la communauté « salaf » à la fois savant et mystique, donne une définition à la notion du “chirk”d’une nuance et subtilité remarquables. Il dit: « Renoncer à l’acte à cause des hommes constitue une ostentation (riya’), et l’acte accompli pour les hommes est associationnisme (chirk). Or, l’ikhlâs est exemption de ces deux défauts. » [3]

La notion d’Al-sawâb, quant à elle, concerne les normes et les principes de la praxis musulmane. Elle renvoie nécessairement au deux choses :

Un modèle : Le Prophète, paix et salut de Dieu sur lui.

Un cadre : qui fixe les règles et les principes de l’imitation obligatoire du modèle dans sa façon d’être et d’agir hormis les choses qui lui sont spécifiques, celles qui relèvent de sa nature humaine ou celles qui concernent les autres restrictions détaillées par les savants des Ouçouls.

Dieu exalté soit-Il dit : « Certes, vous avez dans le Messager de Dieu un excellent modèle (à suivre); pour quiconque aspire à Dieu et au jour dernier et invoque Dieu abondamment » [4]

Dieu le Tout-puissant, le Majestueux n’accepte l’œuvre sincère que si elle est en concordance avec le modèle prophétique (Sunna) et réalisée dans le respect du modèle prophétique.

Le grand savant mystique Ibn ‘Atâ’ Allah Sakandari résume et explique ces deux règles fondamentales en ces termes : « La piété a une apparence et un intérieur. Son apparence, c’est l’observation des lois divines, et son intérieur, l’intention et la pureté (al-ikhlâs) » [5]

Pour réaliser cette conformité à la Loi et cet attachement à l’esprit du modèle prophétique qui sert de cadre d’action, de gage de fidélité effective à Dieu, de support à la quête de l’excellence et de terreau propice à l’élévation spirituelle, il faut une science de la Chari’a qui offre au fidèle « ….un cadre de référence quant aux obligations, aux interdits, aux règles essentielles (al-‘uçul) ou secondaires (al-furû’), au domaine du culte (al-‘ibâdât) ou à celui des affaires sociales (al-mu’âmalat), …etc. »[6] .

L’ascension spirituelle du fidèle ne peut, en aucune manière, se concevoir sans règle ni cadre, qui maîtriseraient ses instincts et disciplineraient l’égo volatile aussi bien dans ses pulsions les plus grossières que pour les penchants les plus subtiles et qui demeurent de loin les plus durs à apprivoiser et à corriger.

Dès lors, l’antagonisme que la pratique de certains musulmans peut éventuellement révéler et accentuer entre la science théorique, la pratique concrète et les finalités spirituelles, n’a pas lieu d’être et doit disparaître par un effort scientifique et éducatif, une vigilance accrue et par l’engagement dans un cheminement de longue haleine.

L’amour et la sagesse, la science et l’engagement, la spiritualité et la participation, l’intériorité et l’extériorité doivent remarcher ensemble du même pas, s’accroître et fleurir ensemble comme à l’époque du Prophète, paix et salut de Dieu sur lui, et ses nobles compagnons.

C’est cette harmonie et globalité dans la démarche qui constituent la marque par excellence de l’agir islamique tel qu’il a été illustré de la façon la plus parfaite dans la Sunna du Prophète, paix et salut de Dieu sur lui.

[1] Coran 98/5

[2] Rapporté par Muslim

[3] Al- Jurjânî ; livre des définitions page 52

[4] Coran 33/21

[5] Shifâ’ al- Sâ’ il li-Tahdhîb al-Masâ’il, La voie et la Loi  ou le Maître et le juriste ; Ibn Khaldoun , Traduit de l’arabe par René Pérez ; page 145

[6] Le verbe et ses signes ; Préface de Tariq Ramadan, le Noble Coran nouvelle traduction du sens de ses versets, éditions Tawhid ; 2005

 

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